LE TRAITEMENT DES IMPAYES DE LOYERS COMMERCIAUX PAR TEMPS DE COVID

5 OCTOBRE 2021

Les loyers commerciaux échus durant la crise sanitaire sont ils exigibles?

L’ ordonnance n°2020-316 du 25 mars 2020 prévoyait seulement en son article 4 la situation suivante:

« Les personnes mentionnées à l’article 1er ne peuvent encourir de pénalités financières ou intérêts de retard, de dommages-intérêts, d’astreinte, d’exécution de clause résolutoire, de clause pénale ou de toute clause prévoyant une déchéance, ou d’activation des garanties ou cautions, en raison du défaut de paiement de loyers ou de charges locatives afférents à leurs locaux professionnels et commerciaux, nonobstant toute stipulation contractuelle et les dispositions des articles L. 622-14 et L. 641-12 du code de commerce.Les dispositions ci-dessus s’appliquent aux loyers et charges locatives dont l’échéance de paiement intervient entre le 12 mars 2020 et l’expiration d’un délai de deux mois après la date de cessation de l’état d’urgence sanitaire déclaré par l’article 4 de la loi du 23 mars 2020 précitée ».

Pénalités et autre application de  clause résolutoire ne pouvait donc pas s’appliquer.

Restait néanmoins l’épineuse question de l’exigibilité des loyers commerciaux.

Telle est la question que se pose tant les bailleurs que les preneurs et qui a animé nos juridictions de première instance durant l’année écoulée.

En tant que praticien du droit la difficulté pour nous autres avocats est double: la nouveauté que représente en tant que telle la crise sanitaire que nous vivons encore mais aussi les multiples sources de droit dans lesquelles nous pouvons puiser pour trancher le litige en faveur de nos clients ou plus simplement leur donner conseil sur l’attitude à adopter: contentieux ou transaction lorsque la question du non paiement des loyers se pose…

Les juridictions de première instance se sont prononcées et ont adopté pour certaines des positions différentes.

Le Tribunal Judiciaire de Chartes a donc posé une question à la Cour de Cassation sur le point de droit qu’est l’exigibilité des loyers commerciaux par temps de covid avant de trancher librement le litige porté à sa connaissance. (demande n°21-70.013.)

L’avis de la troisième chambre civile de la cour de cassation doit être rendu aujourd’hui (si les juges suprême acceptent d’en donner un)!!

 

Quelques éléments de réponses

Timothée BRAULT s’est penché sur les réponses probables à cette difficulté en l’état des jurisprudence connexes en la matière. Je vous  livre un extrait de son :

“Sur l’exception d’inexécution. Sauf à revenir sur une jurisprudence établie, la Cour devrait estimer que les circonstances ayant conduit les bailleurs à manquer, malgré eux, à leur obligation de délivrance constituent un cas de force majeure et, dès lors, ils ne pourraient être tenus responsables du contexte épidémique qui n’est pas de leur fait.La réponse à la question semblerait donc négative, le preneur ne pouvant légitimer son refus de payer le loyer par de ce fondement.

Sur la force majeure. L’impossibilité de se prévaloir de la force majeure pour le débiteur d’une somme d’argent pourrait, quant à elle, être relativisée, la loi admettant désormais l’empêchement temporaire.Il peut en effet être soutenu que le confinement a provisoirement empêché les preneurs d’exécuter le bail mais encore faudra-t-il, pour les exonérer, établir une réelle impossibilité de s’acquitter des loyers puisque « la seule irrésistibilité de l’événement caractérise la force majeure ».La réponse éventuelle ne devrait donc pas anéantir le droit de créance des bailleurs pour les loyers échus durant le confinement – évoquer la reconnaissance d’un empêchement temporaire est déjà hardi – d’autant plus que cette période est aujourd’hui révolue.

Sur la perte partielle de la chose. Sur ce point, une précision pourrait être bienfaitrice mais la jurisprudence rendue au visa de l’article 1722 du code civil n’est plus à faire et elle assimile déjà l’impossibilité administrative d’user de la chose louée à sa destruction partielle.Là aussi, seuls les faits permettront d’apprécier si la situation du locataire correspond à cette impossibilité et, partant, si elle relève de ce texte.

Source: Article de l'excellent Timothée BRAULT intitulé "Loyers commerciaux et covid : en attendant l’avis de la Cour de cassation …."publié sur le site internet Dalloz Actualités daté du 10 septembre 2021.

Je vous recommande cette lecture avant publication de l’avis de la cour de cassation.

 

 

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